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Hier c’était Bamako. Le 13 novembre c’était Paris. Le 12 c’était Beyrouth. Tiens, on n’en a pas beaucoup parlé de celui-là, à croire de les attentats au Liban n’intéressent plus personne. On s’y est tellement habitué, qu’on n’y fait plus attention. N’est-ce pas dans ce pays qu’ils ont été inaugurés, qu’ils ont battu les records de victimes innocentes ? Alors un de plus, un de moins. Eh, bien non ! Moi j’enrage, je fulmine. Quand une bombe ou qu’un abruti de kamikaze se fait exploser dans une rue de Beyrouth, c’est comme si mon cœur éclatait. JE VOIS ROUGE ! Les 43 morts et 239 blessés du quartier chiite de Bourj el-Barajneh ont été massacrés par des extrémistes sunnites, tout aussi abrutis et nocifs que ceux de Daech et de Al Qaïda. C’est pour punir le Hezbollah, organisation paramilitaire chiite libanaise qui lutte en Syrie contre les tueurs d’Al Baghdadi, que conformément à leurs odieuses coutumes, ces fanatiques s’en sont pris aux populations civiles, comme ils l’ont fait d’ailleurs le lendemain, à Paris, pour punir la France qui bombarde Rakka, la pseudo capitale du pseudo état islamique. J’ai longtemps été correspondant de guerre au Liban. J’aime ce pays. J’aime son peuple d’origine phénicienne dans sa majorité. Qu’il soit sunnite, chiite, druze ou chrétien, c’est plus fort que moi, il m’attendrit. Terre de commerçants, de montagnards, de guerriers qui ont dû au cours de leur histoire se défendre contre les Turcs et les royaumes arabes voisins, c’est aussi un pays de poètes et d’écrivains qui ont longtemps appelé notre pays, dans leur accent français si caressant « la douce mère ». Elle l’est restée dans l’esprit de certains mais nos gouvernants successifs n’ont pas su, hélas, comprendre ce rôle maternel et aimant que les Libanais attendaient de la France et nous avons perdu en partie cette émouvante affection. Ils sont nombreux, dans ce beau pays du cèdre, les poètes et les auteurs qui écrivent dans la langue de Molière. En voici quelques uns : Robert Abirached, Etel Adnan, Ezza Agha-Malak, Bernard Anton, Andrée Chedid, Charles Corm, Georges Corm, Carole Dagher, Jean Daoud, Farjallah Haïk, Jad Hatem, Hector Khlat, Vénus Khoury-Ghata, Amin Maalouf, Charif Majdalani, Wajdi Mouawad, Abdallah Naaman, Alexandre Najjar, Salah Stétié, Georges Schehadé, Charbel Tayah, Yasmina Traboulsi, Nadia Tuéni, Hyam Yared, Ramy Zein.
Vous en connaissez certains. Grand est leur talent. Et juste pour nous rafraichir la mémoire voici ce très bouleversant poème de Claude Moukarzel dédié aux poétesses disparues dans le grand chaos qui frappa cette terre inspirée.
Ô Liban! Où sont celles qui disparurent
Sous le fracas strident des bombes
Et qui laissent tant de rêves flétris
Sous les caveaux plombés des cimetières
Je pense à ton doux visage Nadia Tuéni
Nimbé comme une icône Byzantine
Qui partis de l'autre côté du miroir
Retrouver ta fille ton cœur amputé du sien
Je pense à toi Rim Ghandour
Qui sacrifias tes jeunes printemps
Pour ne plus voir le ravage
Des crimes fratricides
Je pense à toi Samia Toutongi
Qui ouvris grande ta porte
Aux peintres et aux poètes
Quand l'effroi dans la ville en feu
Vidait les rues et les artères ensanglantées
Jaloux les "orgues" de la haine
Fracassaient ton corps et ton sanctuaire
Et toi Amal Joumblatt
Le cœur écorché et les vers prémonitoires
Qui dans ta douleur déclamas
« Et je ne regrette rien
Seulement d'avoir vécu »
Et toi Carole Eddé
Qui exprimais ta jeunesse et ta joie
Dans ta belle ville de Zahlé
Pris dans les tourbillons de la violence
Ton corps disloqué sous les décombres
Mais vous et toutes les autres
Vous êtes toujours vivantes
Dans nos mémoires frémissantes
Vos poèmes éclaireront nos âmes
Et longtemps encore celles de nos enfants
Ô Liban! N'oublie jamais tes filles
Celles qui dans la joie et dans la peine
Ont chanté tes plaines tes montagnes
Et tes matins resplendissants.
Vivaaaaa !