Pourquoi tant de cris ? Pourquoi tant de joie. Des joueurs milliardaires déclenchent la liesse d’ouvriers mal payés, de smicards indigents, de paysans dans la gêne, de chômeurs sans le sous. Réveillons-nous, nom de dieu !
Le miroir aux alouettes
Ces franchouillards bruyants qui occupent nos rues
Font hurler leurs clacksons et crient « on a gagné ! »
Parce que l’équipe de France vient de marquer deux buts
De colère et révolte me font trépigner.
Que j’aimerais les voir brandir notre drapeau
Pour partir vaillamment à l’assaut d’un système
Qui sponsorise à fond d’efficaces appeaux
Capables de générer ces délires obscènes.
Que font-ils dans leurs vies ces braillards excités ?
Quels sont leurs idéaux, leurs pensées, leurs croyances ?
Ont-ils vraiment besoin qu’une équipe de France
Marque deux buts pour être certains d’exister ?
Si oui, mes chers amis, on est très mal parti
Et ce n’est pas demain qu’on changera ce monde
Qui promeut à l’envie ce qui nous abêtit
Et empêche d’éclore les idées fécondes
Sur la plage d’Antibes passent des ombres noires
Des vendeurs de chapeaux que personne ne voit
Ils ont fui l’Afrique en nourrissant l’espoir
Qu’ils trouveraient ici un travail et un toit.
Et pendant que pavoisent des supporters ivres
Ces migrants, très discrets, proposent leurs couvre-chefs
Et n’ont même pas droit à un regard très bref,
Eux qui venaient ici dans l’espoir d’y mieux vivre.
Ce choc des deux visions me perturbe beaucoup
Moi je pavoiserai quand nous serons capables
De nous montrer humains, accueillants, charitables
Avec ceux que la faim a fait venir chez nous.
JB