Mes larmes du jour (après peut-être des pubs insanes)
Derrière les murs épais de notre maison d’Antibes
J’entends, le cœur serré, la petite fille qui rit.
Même dans mon sommeil, il m’arrive par bribes
Ce rire si joyeux qui nous vient de Syrie.
Sous les chapelets de bombes qui tombent tout autour d’eux
Un père pour sa gamine a inventé un jeu
Et chaque déflagration provoque une grande joie
Chez l’enfant qui devrait plutôt hurler d’effroi.
Le film « La vie est belle » me revient en mémoire.
Là, dans l’horreur d’un camp nazi, un père aimant
Fait croire à son garçon qu’il vit une belle histoire
Où les bons, à la fin, triompheront des méchants.
Mais le remake d’Idleb n’est pas une invention
Même si Benigni en est l’inspirateur
C’est Béchir el Assad le réalisateur
Et lui, hélas, n’est pas un auteur de fiction.
Le papa qui est âgé d’une trentaine d’années
Le sait mais sait aussi ne pas montrer sa peur
Pour que sa fillette éclate d’un rire spontané
A chaque bombe qui sème autour d’eux la terreur.
Ce rire enfantin qui a traversé la mer
Puis un vieux mur de pierres pour venir jusqu'à moi
N’est même pas entré dans l’immeuble de verre
Des Nations-Unies restées sourdes à cette joie
Juvénile jaillissant d’un terrifiant vacarme.
Et pourtant sur le net elle devenait virale,
Et bouleversait le monde par son rire d’alarme
Cette petite Syrienne à l’humeur si joviale.
Jean Bertolino