Après la sidération, j’ai ressenti un besoin fou de repenser à mon enfance et à la terre qui a forgé mon âme.
( APRÈS L'INTRUSION IRRITANTE DE LA PUB)
On devrait être heureux quand on a dix-huit ans
On n’est pas du pays où l’on naît par hasard.
On est du pays où l’on a ses souvenirs
Et où l’on s’est enraciné tel un fayard
Avant de s’en extraire pour finir de mûrir.
C’est le grand privilège du monde animal
Contrairement, bien sûr, au monde végétal.
Il essaime mais sitôt que d’une graine il nait,
Sur le lieu où il pousse, l’arbre se fixe à jamais.
A seize ans j’ai quitté un monde minéral
Fait de pics, de rondeurs et crêtes dentelées
Où de sombres sapins s’accrochaient dans le moindre val
Laissant les pentes douces aux feuillages pommelés.
J’ai vu des paysages beaucoup plus dépouillés,
Des hauts plateaux déserts parsemés d’herbe rase,
Balayés par les vents et que le ciel écrase
Et des pays trop plats aux horizons mouillés.
Mais dans ma mémoire un seul décor perdure.
Il s’est gravé en moi dans ma petite enfance.
Ce n’est pas Marseille, la ville de ma naissance,
Qui a pétri mon âme, forgé mon ossature.
C’est le lieu où j’ai connu mes premiers émois,
Que j’ai tant admiré, qui est ancré dans mon cœur.
Allons ! Ne cherchez pas midi à quatorze heures.
Mes racines mentales plongent dans la Savoie.
Je sais donc d’où je viens, d’un paradis perdu
Car ce pays n’est plus tel que je l’ai connu.
Moi-même j’ai changé. Je suis devenu vieux,
Mais d’avoir des racines fait de moi un heureux.
Si c’est, bien sûr, ma mère qui m’a mis au monde
Et nourri de son lait durant mes premiers mois
C’est beaucoup plus tard que je suis devenu moi,
Quand la Savoie m’eut nourri de sa terre féconde.
Et grâce à ses montagnes aux formes éternelles
Ses fragrances grisantes, ses oiseaux chahuteurs,
Ses aériens chamois qui défient les hauteurs
J’ai oublié les dieux pour la vénérer ELLE !
Elle est omniprésente dans nos vies chaque jour
Cette Terre qui nous a prodigué son amour.
Comment peut-on aimer un dieu hypothétique
Qui crée tant de discordes et de crimes tragiques?
Le problème, voyez-vous, sont les gens sans racines
Qui n’ont pas de repères, ne savent plus qui ils sont.
Déboussolés, ils mordent à tous les hameçons
De prêcheurs qui les égarent par leur noires doctrines.
Ils proposent aux êtres dans la déréliction,
Pour qu’ils ne le soient plus, d’horribles solutions.
Et hélas les migrants sans terre ou domicile
Pour les sectaires haineux sont des proies très faciles.
Les études contribuent à ouvrir les esprits
Mais tous ces fanatiques ne veulent à aucun prix
De cette éducation sans barrière et laïque
Qu’on prodigue dans les écoles de la République.
Ils ont armé la main qui a tué l’enseignant
Lequel ne pouvait croire qu’on lui couperait la tête
Pour avoir expliqué à de jeunes enfants
Qu’on peut rire de tout, y compris d’un « prophète ».
C’est un acte effrayant quand on a 18 ans
D’égorger un homme en criant « Allah est grand » !
Si ce jeune Tchétchène avait eu des repères
Aurait-il sombré dans cette folie meurtrière?
On devrait être heureux quand on a dix-huit ans,
Jouir de senteurs qui font frémir les papilles,
Avoir l’envie de plaire, de sourire aux passants
Et un cœur qui palpite à l’approche d’une fille.
A bas les croyances assassines !
JB