Quand à Paris il était bon de ne pas passer pour un plouc.
( après l’inévitable intrusion)
Je suis un plouc et fier de l’être
Est-il très surprenant qu’étant né à Marseille
Et arrivé en Savoie à l’âge de deux ans,
Juste au moment où l’esprit d’un enfant s’éveille,
Ce pays m’ait imprimé son tempérament ?
A l’instar d’un oison qui doit quitter son nid
J’ai un jour pris l’envol pour des contrées lointaines
Et partout dans le monde, même en Océanie
La Savoie me suivait pareille à une traîne.
Plus tard quand je me fixai dans la capitale
Mes mots lents et mes allures provinciales
Donnèrent matière à des ragots condescendants.
Je me poliçai donc et gommai mon accent.
Mais que faut il penser de cette mise aux normes
Qui m'a transformé en Parisien bon ton
Comme elle le fit avec Auvergnats ou Bretons
En les poussant de force dans un moule uniforme ?
J’ai adoré la France des années cinquante
Où même à Paris perduraient quelques accents
D'un argot encore présent mais évanescent
Né d’une dérision frondeuse et piquante.
Audiard s’inspira de cette langue imagée
Dans ses dialogues qui font toujours référence.
J’aimais aussi Pagnol et sa plume immergée
Dans le langage solaire des terres de Provence.
Je riais en écoutant le petit Quinquin,
Cette berceuse qui chuinte presqu’à chaque strophe
Et j’aimais entendre aussi « Les gars de Roscoff »
Chantés dans un breton vigoureux et taquin.
Hélas nos voix sont devenues presque pareilles
Même si dans la tonalité persistent des nuances.
Qu’aurait été Raimu sans l’accent de Marseille
Lui, l’incarnation du plus vieux port de France ?
Est-ce normal qu’on y entende parler pointu
Quant la télé interroge des gens du crû ?
Idem à Toulouse, à Lyon ou à Bordeaux
Pourquoi perdre l’accent ? Gardez le verbe haut !
Chaque intonation est issue d’un terroir
Qui lui est spécifique, reliée à une histoire
Ainsi qu'à un biotope qui l'a affutée
« L’ennui naquit un jour de l’uniformité »
VIVA JB