Sa voix caressa mon enfance. ( Après la pub intruse)
Joséphine au Panthéon, OUI !
Le Panthéon pour Joséphine aux deux amours
Pourquoi pas ? Elle était hardie, elle était belle
Et Paris l’adopta. Comme une fleur nouvelle,
Elle enivra ses nuits et enchanta ses jours.
Elle avait un parfum piquant et exotique
Qui mêlait les séductions de deux continents
Un accent américain, une couleur d’Afrique,
Un sens inné du rythme fort impressionnant.
Née dans une famille indigente du Missouri,
La chance au départ ne lui a pas trop souri
Elle fréquenta peu l’école. Dès son plus jeune âge
On la prédestina à être femme de ménage.
Pauvre et noire, la pire rançon de la négritude.
Devrait elle la payer toute sa vie durant ?
Face à un tel destin, on cherche des interludes
A son premier mariage elle n’avait que 13 ans.
Il y en eut d’autres bien sûr, dont un moins éphémère
Quand elle sera enfin sortie de la misère.
Mais pour ça, elle devra fuir les Etats-Unis
Ses lois raciales honteuses, son mépris tant honni.
Sur une jeune Noire sans préjugés et fort bien faite
Ayant un corps qui vibre et des envies de fête
Paris, ville audacieuse et sans ségrégation,
Exerçait une irrésistible attraction.
Mais les inventeurs du « Y a bon Banania » ont
Des peuples noirs une "rousseauiste" vision
Ils les voient en sauvages naïfs et infantiles
Et leur prêtent souvent un langage imbécile,
Voire des mœurs primitives proches de la nature.
En l'an mille neuf ccnt dix neuf, aux Folies Bergères
Joséphine apparut, frétillant d’un derrière
Caché par des bananes, inoubliable parure.
Le tout Paris accourut voir le phénomène :
La prestation érotique d’une danseuse d’ébène
Se trémoussant au son des tam-tams frénétiques
De batteurs qui semblaient surgir des jungles d’Afrique
Elle évolua vite et de la revue nègre
Elle passa à des spectacles un peu moins allègres
Mais plus dans l’air du temps et son nouveau visage
Fut celui d’une danseuse qui chantait le jazz.
Ensuite elle devint meneuse de revue
Reprit aussi des tubes au succès garanti
Comme « J’attendrai ton retour » de Rina Ketty.
Grâce à son « J’ai deux amours » elle fut portée aux nues.
Oui, elle aima Paris la belle Joséphine
Paris mais aussi le pays tout entier,
Elle attrapait les cœurs comme une liane serpentine
Pour les lier l’un à l’autre et s’en faire un collier
Le jour où les nazis entrent dans la capitale
D’amertume, de fureur, de révolte son âme vibre.
Sans barguigner, comme mue par un élan vital
Elle rejoint les services secrets de la France Libre.
Elle s’était fait un nom dans le monde du spectacle
Elle s’en fera un autre dans la Résistance.
Trois glorieuses médailles la hisseront au pinacle
Des héros qui ont le mieux lutté pour la France.
Qu’a-t-elle encore à prouver cette chère Joséphine
Chanteuse adulée, vénérable héroïne ?
Elle eut pu oublier sa misérable enfance,
Et dire « Merci, mon Dieu, j’ai eu beaucoup de chance ».
C’était mal la connaître. Elle voulut être mère
De petits orphelins issus de diverses les races.
Elle les déracina de leur milieu sans grâce
Pour les transplanter dans un paisible phalanstère.
Les maris dans sa vie furent un peu comme des pions.
Avec le quatrième elle mena cette action
Il était chef d’orchestre, s’appelait Jo Bouillon
Et aux gosses adoptés il a légué son nom.
Rimbaud au panthéon eût été un ratage
Ceux qui voulaient l’y mettre, lui auraient fait outrage.
Mais Joséphine y a droit, c’est une évidence
Et nos Grands Morts l’attendent avec impatience
VIVA !
JB