Délire du jour (Glissez sur la pub)
Dans la peau d’un tilleul.
J’ai germé, un jour, pas très loin d’une rivière
Avec, au bas mot, un millier de congénères.
A peine éclos, je vis que je n’étais pas seul
Et ferai partie d’une grande forêt de tilleuls.
J’eus une petite enfance heureuse à cette pensée.
De voir, autour de moi, tous mes copains pousser
M’insufflait, je l’avoue, une aveugle confiance.
J’espérais ne connaître que la luxuriance.
Illusion enfantine loin des réalités
Nous n’étions pas sauvages, on nous avait plantés.
Attentifs comme les vigiles d’un orphelinat
Aucun jardinier, de nous, ne se détourna
Et quand nous atteignîmes, hélas, l’âge escompté
Dans les rues de Paris ils nous ont replantés.
Depuis, regardez-nous, quelle peut être notre allure
Au bord de rues bruyantes encombrées de voitures
Et dans nos ronds de terre infestés de mégots ?
Si nous n’étions pas victimes de ces saligots
Qui nous balancent leurs filtres gorgés de nicotine
Peut-être aurions-nous tous une bien meilleure mine.
Même ainsi alignés comme des prisonniers
Dans les rues de Paris, sans cette liberté
Que seule peut faire naître la biodiversité…
Nous rêvons nous aussi mais point ne le croyez.
Bien trop accaparés par vos egos énormes
Vous êtes sourds aux sentiments qui proviennent d’ailleurs
Que vous importe nos émois puisqu'ils sont hors norme
Et que nous, tilleuls, n'avons ni cerveau ni cœur ?
JB