Bonjour, amies et amis. D’habitude c’est moi qui rédige des sonnets sur le peuple Kurde tant de fois trahi. Je croyais être le seul dans ce genre à le louer en vers. Erreur, l’ami Jean Claude Perpère est venu lui aussi butiner les fleurs du Taurus, du Zagros, du Djoudi. Les ayant mélangé à celles de son Ariège natale, il a régurgité un nectar d’une saveur sans égale. Puisse un jour un chanteur kurde le découvrir, et telle une abeille receveuse le transformer en un miel sonore. Alors d’une montagne à l’autre du Kurdistan tel un appel puissant, les vers du barde occitan résonneront et contemplant leurs sommets qui les répercuteront en échos, les villageois à la fin de chaque strophe lanceront un long Bîji Bîjiiiiiiiiiiiiiii !
Et quand la voix lentement s’éteindra, ils retourneront fusil en bandoulière labourer leurs champs ou garder leurs troupeaux. Vivaaaaaaaaaaaaa !
Les turcs ont passé là…
« Les Turcs ont passé là. Tout est ruine et deuil »
Deux siècles après Chio, voilà qu’ils recommencent,
Ou continuent plutôt en profanant le seuil
Des demeures d’Afrin, déchaînant leur violence,
Le pillage, le viol, le meurtre et l’incendie.
Et l’infâme satrape a lâché ses hyènes,
Les bouchers de Daech qu’il avait accueillis
Dans leur fuite éperdue, dévorés par la haine
Des rudes peshmergas qui les avaient réduits.
Kurdes écartelés par les quatre frontières
Qu’on a tracé sur eux pour les mettre à genoux
S’entêtent à narguer les diktats, les sicaires,
Les obus et les gaz et rendent coup pour coup,
Toujours prêt à se battre et sans jamais faiblir
Contre ses oppresseurs, les despotes arbitraires
Qui vainement s’acharnent à les assujettir,
A rayer leur culture plusieurs fois millénaire,
A tuer dans leur cœur tout espoir d’avenir.
Mais ces hommes et ces femmes récusent la détresse.
Dans leurs artères coule le sang guerrier des Mèdes
Qui ont conquis l’Orient avec le roi Xerxès.
Les peshmergas modernes n’ont pas l’âme plus tiède.
Leur courage à Mossoul, Raqqa et Kobané,
A permis de briser le commun ennemi
Qui de son fief lointain lançait ses forcenés
Assassins fanatiques pour meurtrir nos pays.
Les peshmergas, là-bas, ont taillé dans le vif
Des « katibas » barbares, nous vengeant de l’horreur.
Ils y ont versé leur sang, en espérant qu’enfin
Nos Etats d’Occident, répondant à l’honneur,
Respecteraient leur dette et leur tendraient la main.
Las ! Comme en 1920 quand, malgré les promesses,
On les avait, sans vergogne, lésés d’une patrie,
De nouveau l’Occident, constant dans sa bassesse,
Combine l’ingratitude et la tartuferie.
Préférant la litote pour mieux sauver la face,
Nos politiques invoquent des raisons stratégiques,
Car le maître-chanteur d’Ankara nous menace
De relâcher sur nous les migrants pathétiques.
Surtout, ne parlons pas de Nettoyage Ethnique !
Car c’est un vilain mot disant la prodition
Dont se rendent coupables l’Europe et l’Amérique.
Et évitons le terme de Non-Intervention
Par trop évocateur de lâcheté cynique
Prodrome des épouvantes et abominations.
Mais sachez-le, vaillants amis du Kurdistan,
Ce cri d’indignation n’est pas d’un solitaire,
Bien des coeurs par chez nous vous sont reconnaissants,
Outrés que nos caciques aient choisi de se taire.
Jean Claude Perpere